Au temps des fauvettes

Par Michel-Paul Côté 7:00 AM - 5 mai 2024
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Mon intérêt pour l’observation des oiseaux n’est pas récent, remonte même à fort longtemps.  Mes premières observations d’intérêt furent pour des oiseaux assez visibles, de bonne taille, vocaux, parfois colorés. N’ayant pas de jumelles, les plus petits oiseaux se cachant dans les buissons étaient moins intéressants.

Mais ma première paire de jumelles a bouleversé tout ça. Il s’agissait de vieilles jumelles de l’armée, lourde, beaucoup trop puissante. Mais ça permettait, en théorie, d’accéder à un tout nouveau monde.  En théorie, car la ville, l’été, n’était pas un milieu idéal pour faire des découvertes ornithologiques.

Puis arriva le printemps de l’année suivante. Par une matinée chaude du début mai, dans un parc municipal non loin de la maison, j’ai remarqué pas mal d’activités dans le petit boisé. Les arbres étaient encore en bourgeons, on voyait facilement des oiseaux se déplacer de branche en branche. Ils étaient nombreux, bruyants, mais assez petits. Je suis retourné à la maison chercher mes grosses jumelles et c’est à ce moment que j’ai découvert le monde fascinant des fauvettes.

La migration printanière, à Montréal, peut amener près de 25 espèces différentes de fauvettes lorsque les conditions sont propices. J’avais entre les mains, ce matin-là, un billet gagnant de loterie, mes jumelles d’armée. Des oiseaux de toutes les couleurs, spectaculaires en plumage nuptial. Il y en avait partout. Ce fut un avant-midi qui a probablement influencé mon obsession pour l’observation des oiseaux. En après-midi, les oiseaux étaient plus rares. La semaine suivante, les feuilles étaient sorties, rendant l’observation plus difficile, et le nombre et la variété d’oiseaux avaient grandement diminué.

J’avais été témoin d’un phénomène assez peu fréquent, ce que les anglophones appellent un ‘fall out’, soit une arrivée massive d’oiseaux en migration, causée par des conditions météorologiques particulières.

Bien sûr vous savez que les fauvettes de jadis sont les parulines d’aujourd’hui. Le nom fut changé dans les années 80. Le même sort fut réservé aux Pinsons, maintenant appelés Bruants.

Les parulines arrivent du Sud en mai, souvent d’Amérique centrale où elles passent l’hiver. Elles sont des millions à remonter vers le nord pour y passer quelques mois, le temps d’y élever une petite famille.

Elles voyagent de nuit, se reposent et se nourrissent discrètement le jour, à l’abri des prédateurs, dans les buissons.

Plusieurs sites Internet permettent maintenant de suivre en direct les mouvements migratoires des oiseaux. Ce sont les radars météo qui captent ces mouvements nocturnes massifs. Voir https://birdcast.info/migration-tools/live-migration-maps/

La paruline gazouille plus qu’elle ne chante. Plus d’une trentaine d’espèces sont identifiées au Canada, au moins 25 au Québec. Mais identifier les parulines est difficile, très difficile. Elles sont petites, furtives, se camouflent dans les buissons, et l’été assez silencieuses afin de ne pas attirer l’attention des prédateurs. De plus, à l’automne, rien ne ressemble plus à une paruline qu’une autre paruline. Ternes, brunes pâles, mâles et femelles semblables. Même les experts sont confondus à cette période de l’année.

Mais le printemps est différent. Pendant quelques semaines, les mâles arborent des plumages nuptiaux uniques, colorés, spectaculaires. Il s’agit d’attirer et de séduire la belle, ils sont donc plus visibles et bruyants.

Ici dans Charlevoix, les feuilles des arbres tardent souvent à sortir. Nos parulines se pointent chez nous au début de mai. Elles doivent traverser le fleuve de nuit, parfois avec un vent contraire. C’est pourquoi, au matin, il est possible d’en observer des quantités importantes dans les buissons, sur les rives du fleuve. Après avoir repris des forces, elles poursuivent leur vol vers l’intérieur des terres.

Nous n’avons pas tout à fait la variété que l’on retrouve vers Montréal ou même Québec, mais il est possible d’identifier environ 20 espèces différentes.

Au moment où vous lisez ces lignes, elles sont chez nous. Parc boisé du quai de Baie St-Paul, St-Joseph de La Rive, toute l’Îles aux Coudres, le parcours des Berges de Clermont, la Halte routière de St-Siméon… Tous des endroits exceptionnels pour être témoin d’un spectacle unique.

C’est le temps des fauvettes, sortez vos jumelles….!!!

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